Tu le sais peut-être, la Radio-Télévision belge de la Fédération Wallonie-Bruxelles (RTBF) est un média dit « public ». A la différence de ce dernier, RTL, son plus gros concurrent en Belgique francophone est détenu par des fonds privés. Nous allons voir au travers de cet article que cette petite distinction rapproche plus étroitement la RTBF du monde politique belge francophone. Que cela concerne sa gestion ou son financement, il y a un rapport avec la politique à beaucoup d’égards.
La RTBF c’est quoi globalement ?
Bref historique
Evidemment, avant d’expliciter clairement les points chauds entre politique et le média en question, il faut savoir qui est réellement ce dernier. Pour cela, il faut remonter à 1930 et la création de l’Institut National de radiodiffusion qui est en quelques sortes l’ancêtre de la RTBF. En 1960, le nom change pour devenir RTB et quelques années plus tard, le nom définitif voit le jour. D’un point de vue légal, la RTBF est considérée comme une « entreprise publique à caractère autonome » depuis le décret du 14 juillet 1997. Cela nous montre déjà une chose claire : ce média est actuellement détenu par le pouvoir public et plus précisément par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle a cependant un caractère autonome, ce qui signifie qu’elle doit donc fonctionner de son côté sans interférence d’autres tiers.
Un financement public
Actuellement, la RTBF dispose d’un budget annuel d’environ 300 millions d’euros. 70% de ce budget émane des pouvoirs publics (la Fédération Wallonie-Bruxelles). Les 30% restants proviennent simplement de la publicité produite sur les différents médias du groupe RTBF. Cela veut donc dire que plus de la moitié du budget est allouée par le monde politique.
Une gestion très précise
Les deux principaux organes de gestion de la RTBF sont le conseil d’administration (le CA) et l’administrateur général. Ensemble, ils veillent au bon fonctionnement de l’entreprise. Nous allons voir dans la suite de cet article que ces deux entités de gestion sont en contact étroit avec le monde politique belge francophone et notamment en ce qui concerne les « contrats de gestion ». Ces derniers sont en quelques sortes les « guides de bon fonctionnement » du média et sont renouvelés tous les 3 à 6 ans. Ils sont négociés par la/le ministre de tutelle et l’administrateur général de la RTBF. Le tout est ensuite approuvé par le conseil d’administration de la RTBF et le gouvernement de la communauté française. C’est ensuite publié au Moniteur belge.
Simplement au cours de cette brève présentation, on voit bien que le monde politique et public entretient déjà une grande influence sur la RTBF et son fonctionnement. Rentrons cependant encore plus dans le détail afin de remarquer d’autres rapports entre politique belge francophone et le média qu’est la RTBF.
Le conseil d’administration de la RTBF
Un organe constitué à 100% de personnalités publiques
Là où l’on peut encore mieux voir le rapport entre la Radio-télévision belge de la Fédération Wallonie-Bruxelles et le monde politique belge francophone, c’est au niveau du conseil d’administration de ce média. En effet, cet organe de gestion est constitué de 13 membres élus par le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. A ceux-ci, s’ajoutent 2 commissaires du gouvernement de cette même fédération. Le rôle du conseil d’administration est de veiller au respect de l’intérêt général, à la mise en place des contrats de gestion et d’examiner l’équilibre financier de l’entreprise. Le conseil d’administration a le pouvoir d’accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à l’entreprise. On comprend donc que son influence et son rôle sont très importants.
Un processus de nomination très politique
Les membres du conseil d’administration de la RTBF sont nommés par le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, sur proposition du Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. On voit donc encore une fois un lien entre ces deux éléments.
Le processus de nomination des membres se déroule comme suit :
- Le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles établit une liste de candidats potentiels en fonction de leur expertise dans les domaines de la communication, de la culture, de l’économie, … .
- Le Gouvernement transmet cette liste au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
- Les groupes politiques représentés au Parlement proposent chacun un candidat pour chaque siège vacant.
- Le Parlement vote ensuite pour élire les membres du conseil d’administration de la RTBF.
Les membres du conseil d’administration sont nommés pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Par ailleurs, ils ne peuvent pas être membres du gouvernement, membres d’un cabinet ministériel, député, sénateur, bourgmestre ou gouverneur de province. On voit donc qu’il y a quand-même une certaine protection afin d’éviter que les membres du conseil d’administration aient des doubles mandats et donc parfois une volonté d’agir un peu biaisée.
Une répartition politique calculée logiquement
Afin d’éviter que des partis soient représentés d’une manière exagérée, il existe un système pour une représentation « équitable » au sein du conseil d’administration. Celui-ci porte le nom de « Clé Dhondt » et vise à répartir le nombre de sièges au sein de cet organe selon la logique des résultats aux dernières élections. Cela signifie que si par exemple le Mouvement Réformateur (MR) effectue des excellents résultats aux prochaines élections, il se verra alors obtenir plus de sièges.

Actuellement, le président du conseil d’administration est Baptiste Erkes, un membre du parti Ecolo. Les partis les plus représentés sont le MR et le PS avec tous deux 4 sièges. Viennent ensuite PTB et Ecolo avec tous deux 2 sièges et enfin le CDH avec un seul et unique représentant au sein du conseil d’administration. La diversité de partis permet d’éviter qu’un seul groupe politique prenne le contrôle total de la RTBF, ce qui poserait évidemment question.
Une logique dans la représentation politique
On peut alors se demander pourquoi cet organe de gestion de la RTBF est représenté par les partis politiques wallons. Il y a en réalité une explication logique derrière tout cela. La présence de personnalités politiques au sein du conseil d’administration de la RTBF a pour objectif de garantir l’indépendance éditoriale de l’entreprise et de veiller à ce que celle-ci remplisse sa mission de service public. Les membres du conseil d’administration doivent agir dans l’intérêt général et veiller à ce que la RTBF réponde aux besoins des citoyens en matière d’information, de culture et de divertissement.
L’administrateur général de la RTBF
Comme expliqué brièvement antérieurement dans cet article, l’administrateur général de la RTBF est également lié au monde politique. En effet, il est nommé par le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles après un appel à candidatures. Sache que depuis le début de la RTB en 1960, tous les administrateurs généraux appartenaient au Parti Socialiste (PS). Actuellement, c’est Jean-Paul Philippot qui brigue son 4ème mandat consécutif (un mandat dure 6 ans).
On remarque donc que dans les deux organes de gestion de la RTBF, le Parti Socialiste (PS), est représenté. Cependant, nous allons voir dans la suite de cet article qu’il existe une multitude de « protections » contre d’éventuels dérives du monde politique sur la RTBF.
Des éléments pour limiter l’influence politique
Les lois
Tout d’abord, afin de limiter l’influence du monde politique sur les médias, il existe plusieurs lois. La plus connue est la loi sur la radio et la télévision de 1969. Elle stipule que la RTBF doit être « indépendante vis-à-vis des partis politiques et des autorités publiques ». Cette loi garantit l’indépendance éditoriale de la RTBF et empêche toute ingérence politique dans la programmation.
Le CDJ et le SDJ
Il existe un contrôle externe de la RTBF : le Conseil de Déontologie Journalistique (CDJ). Celui-ci a pour rôle d’analyser les éventuelles plaintes formulées contre la RTBF. Un code de déontologie journalistique est par ailleurs existant et vise les 4 points suivants :
- la recherche et le respect de la vérité
- l’indépendance du journaliste
- la loyauté (envers ses sources, envers ses collègues,…)
- le respect des droits des personnes
Un contrôle interne est également mis en place pour éviter les dérives (du politique). Celui-ci est assuré par la Société Des Journalistes (SDJ). Ce groupe a pour but d’analyser les contenus qui émanent depuis la RTBF. Elle peut aussi donner son avis sur la nomination de certaines personnes à des postes clés de la RTBF (dans le conseil d’administration par exemple).
Le CSA
La RTBF est aussi soumise au contrôle du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), une autorité administrative indépendante chargée de veiller à la qualité et au pluralisme de l’offre audiovisuelle en Belgique. Le CSA a pour mission de garantir l’indépendance éditoriale de la RTBF. Il doit également veiller au respect de ses obligations légales.
Et donc la RTBF ? Un média politique ?
Après revue de tous ces éléments, peut donc dire que oui, la RTBF compte bien une part de politique en son sein. Cependant, il faut bien avouer que toutes ces représentations du monde politique sont fortement contrôlées et ont un réel sens (assurer les objectifs d’un média qui est avant tout public).
Rachel Crivellaro (membre du service politique de la RTBF) déclarait ceci en janvier 2022 : « Je n’ai jamais reçu d’inflexion dans un sens ou dans un autre de membre du conseil d’administration même de manière subtile« .
Il semble donc qu’il ne faut pas s’inquiéter de cette présence politique au sein du média public qu’est la RTBF.
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