Du 27 janvier au 2 février 2025, la cinquième édition de la Semaine de la Musique belge (SMB) a transformé le pays en une véritable scène musicale nationale. À travers une stratégie de communication collaborative, les acteurs du secteur musical ont uni leurs forces pour célébrer la diversité et la vitalité de la musique belge. Par le biais d’une analyse sémiotique, nous allons examiner la manière dont les affiches, les visuels promotionnels, les slogans, les discours, les médias sociaux et les plateformes numériques ont été utilisés dans le but de promouvoir la musique belge auprès d’un large public tout en créant une dynamique participative et inclusive.
1. Communication collaborative : fondements et mise en œuvre
1.1 Définition et principes
Selon Kaplan et Haenlein (2010), la communication collaborative s’appuie sur le principe de co-création, où les messages et les actions sont conçus de manière interactive par divers acteurs partageant des objectifs communs. Ce modèle permet d’impliquer directement les différents acteurs c’est-à-dire le public, les artistes et les partenaires qui rendent la communication plus engageante et authentique.
Il y a trois principes fondamentaux dans la communication collaborative :
- Co-création des messages : ce principe explique la création collective de contenu entre les organisateurs et le public. Les messages ne sont pas simplement diffusés, ils sont créés en interaction avec les participants. Par exemple, dans le cadre de la Semaine de la Musique, les artistes ont partagé des vidéos de répétitions ainsi que des playlists créées avec l’aide de leurs fans. Le public était également incité à créer et partager du contenu grâce au #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE.
- Interaction directe : selon Alloing et Pierre (2017) la communication collaborative met en avant l’interaction bidirectionnelle c’est-à-dire que le public peut échanger directement avec les créateurs de contenu qui peuvent être les artistes, les fans, les médias, les influenceurs, toutes les personnes qui ont participé à la création de contenu. Par exemple, pendant cet évènement, il y a eu des lives sur Instagram qui ont permis aux artistes de répondre en temps réel à leurs fans.
- Authenticité et transparence : ce principe consiste à créer des messages qui sont sincères. Par exemple, lors de cette semaine, les artistes ont partagé des messages personnels sur leur expérience musicale et leur lien avec la scène belge, ce qui renforce l’authenticité de cet évènement.
La Semaine de la Musique Belge a exemplifié ces principes, en impliquant les acteurs du secteur dans la création de contenus numériques, comme des vidéos, des interviews et des teasers, diffusés sur diverses plateformes.
1.2 Mise en œuvre pendant la SMB 2025
Les outils numériques ont facilité la mise en place de cette stratégie collaborative. Les différentes parties prenantes ont utilisé des plateformes comme Facebook, Instagram, YouTube et TikTok pour diverses raisons :
Tout d’abord, pour atteindre un public plus large, y compris les jeunes générations. Ensuite, cela permet de favoriser une relation directe entre les artistes et le public, ce qui crée ainsi un sentiment de proximité. Pour finir, utiliser des médias interactifs c’est-à-dire les lives, les vidéos et les hashtags pour stimuler la participation active du public.
Ces différentes plateformes numériques ont permis d’instaurer une relation participative, où les utilisateurs ne sont plus de simples récepteurs, mais ils sont également des producteurs de contenu, ce qui renforce l’engagement et la portée de la communication. Par exemple, lors de la SMB 2025, de nombreuses personnes ont partagé sur Instagram ou sur TikTok des vidéos de reprises de morceaux d’artistes belges qui sont accompagnés de l’hashtag #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE. Certains artistes comme Pierre de Maere ont même repartagé ces contenus sur leur compte, ce qui crée donc une boucle d’interaction entre les créateurs, le public et les médias. Cela explique très bien le principe de co-création de valeur qui est expliqué par Kaplan et Haenlein (2010) où chaque participant devient un acteur du récit collectif.
2. Analyse sémiotique des supports de communication
Cette analyse va permettre de décoder les stratégies visuelles, verbales et numériques qui sont utilisées pour transmettre le message de la Semaine de la Musique Belge. Elle met en avant les choix qui ont été utilisés afin de renforcer la communication collaborative.
2.1 Affiches et visuels promotionnels

Légende : Affiche principale de l’édition 2025 de la Semaine de la Musique Belge
L’affiche principale de l’édition 2025 est un élément important de communication, car elle constitue un objet sémiotique central. Elle représente un mélange coloré de tickets dessinés, sur lesquel apparaît systématiquement l’icône noire en forme de losange. Ce symbole représente à la fois un badge culturel, le logo de l’évènement et un signe de ralliement pour la communauté.
Chaque ticket porte la mention « Semaine de la Musique Belge 2025 » dans des typographies sobres et lisibles. Les différentes couleurs (bleu, rouge, vert, rose, jaune, noir…) reflètent la richesse et la diversité de la musique en Belgique. Ce choix graphique transmet plusieurs messages implicites :
- Le patchwork de couleurs joue un rôle important dans la communication de l’évènement. Chaque couleur peut symboliser un style musical différent afin de montrer la diversité de la scène belge. Il n’est pas clairement indiqué quelle couleur correspond à quel style musical. Mais, nous pouvons interpréter certaines couleurs en fonction de leurs significations.
- Bleu : c’est un symbole de la confiance et de la sérénité, le bleu est souvent associé à des genres musicaux comme le jazz ou la musique classique.
- Rouge : cette couleur représente la passion et l’énergie. Elle peut évoquer des styles comme le rock, l’électro ou encore le hip-hop.
- Vert : elle évoque la nature et l’harmonie, le vert est souvent utilisé pour les genres acoustiques.
- Jaune : c’est un synonyme de joie et de créativité, le jaune peut représenter des genres légers et festifs comme la pop.
- Rose : il évoque la créativité, ce qui peut également représenter la musique pop.
- Blanc : cette couleur équilibre l’affiche pour apporter une certaine clarté au contenu.
- Noir : cette couleur apporte de l’intensité comme la musique rock.
- La forme unique de chaque ticket est représentée par des rectangles de tailles et d’angles qui sont légèrement différents, ce qui rappelle que chaque style musical à son identité, son histoire et son public. Tous ces tickets sont réunis dans une même affiche qui montre que même si les styles sont variés, ils font partie d’un même évènement et sont unis par un projet commun. C’est une image forte de la coexistence musicale qui renforce l’idée de communication collaborative c’est-à-dire que chacun apporte sa touche, mais ils vont tous dans la même direction.
- L’aspect « tampon » du visuel avec son effet d’impression manuelle et sa typographie assez simple, donne au visuel une dimension plus artisanale et authentique, ce qui donne presque une impression de fait main. Cela fait penser à un label de qualité comme si participer à la Semaine de Musique Belge était une reconnaissance officielle pour les artistes et les genres musicaux représentés. Cet évènement valorise la musique belge en montrant qu’elle est importante et digne d’être célébrée. Le visuel qui a été fait contribue à donner une place légitime dans le patrimoine culturel belge
En sémiotique, selon Eco (1988), la répétition visuelle combinée à des variations de couleurs fonctionne comme un code de reconnaissance, chaque personne peut s’identifier à une couleur ou un style, tout en faisant partie d’un ensemble commun.
2.2 Le hashtag comme outil de participation
Le choix du hashtag central #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE, qui est placé au cœur de l’affiche en noir sur fond blanc, joue un rôle sémiotique fort. Il ancre le message, selon la terminologie de Barthes (1964), en facilitant l’interprétation de l’image. Ce hashtag sert de repère numérique qui facilite la recherche de contenu lié à l’événement, il crée également un espace conversationnel sur les réseaux sociaux et permet une appropriation instantanée par les usagers, qui peuvent l’utiliser pour publier, commenter ou partager.
Ce message intégré à l’image crée un lien entre le visuel et le support numérique. Il transforme l’image en un espace d’échange, où chaque utilisateur peut partager et transmettre de l’information.

Légende : Capture d’écran d’une photo de Marielou avec le #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE

Légende : Capture d’écran des publications avec le #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE
3. Les médias sociaux : vecteurs de participation et de diffusion sémiotique
3.1. Les plateformes numériques comme espace de collaboration symbolique
La Semaine de la Musique Belge a investi massivement les réseaux sociaux pour créer une communication immersive, participative et multisupport. Les contenus produits ne sont pas seulement des objets promotionnels, ils deviennent des supports sémiotiques dynamiques, transformés, repris et commentés.
Des capsules vidéo, stories Instagram, interviews croisées ou défis TikTok ont contribué à cette narration collective. Par exemple, la chanteuse Héléna a partagé sur Instagram une vidéo où elle révélait sa chanteuse préférée belge, expliquant ce qu’elle appréciait chez elle et comment elle l’avait ajoutée à sa playlist. Elle en a aussi profité pour mettre en avant la musique belge.

Légende : Capture d’écran de la vidéo d’Héléna sur son artiste belge coup de coeur
L’objectif est de faire en sorte que les publics deviennent auteurs du discours sur la musique belge. En cela, la SMB rejoint les logiques de communication collaborative définies par Kaplan & Haenlein (2010), où les UGC (user generated content) deviennent des éléments clés du dispositif.
3.2. Une esthétique adaptée aux codes numériques
La manière dont les visuels sont conçus montre un vrai travail sur les codes de la communication. On y trouve deux éléments qui ressortent plus que les autres : le format vertical et le choix des polices. Le format vertical est très utilisé sur les réseaux sociaux comme Instagram, TikTok ou encore YouTube qui sont des applications adaptées aux smartphones. Cela permet une immersion directe sans que l’utilisateur aie besoin de réorienter son écran, ce qui permet une utilisation spontanée du contenu. De plus, le choix de la police qui est souvent brut, simple et lisible permet de faciliter la lecture même sur les écrans de smartphone. Comme le soulignent Alloing et Pierre (2017), l’adaptation des supports visuels aux usages mobiles permet non seulement de capter l’attention, mais aussi de renforcer la relation de proximité entre l’organisation et son public. Ce style visuel, typique des usages numériques, permet de :
- L’ancrage générationnel (ciblage des jeunes publics)
- La virtualisation des messages (partage rapide, esthétique familière)
- La reconnaissance instantanée des contenus liés à la SMB.
En adoptant des formats propres aux réseaux sociaux, la SMB parvient à intégrer sa dimension collaborative dans l’esthétique même de sa communication.
4. La diversité musicale : signe discursif d’unité
4.1. Une narration de la diversité comme projet politique et culturel
La SMB valorise une palette large de genres musicaux (rock, rap, électro, chanson, jazz…), représentée à travers les visuels, les artistes choisis et les playlists collaboratives. Mais il ne s’agit pas juste de montrer différents genres, c’est aussi un message politique fort.
Les artistes de toutes les communautés linguistiques sont présentés de manière égale, sans donner plus d’importance à l’un ou à l’autre. Cette volonté d’équité passe par plusieurs choix visuels et narratifs :
- Des visuels uniformisés, quel que soit le style musical ;
- Des formats similaires pour chaque artiste (vidéos, articles, citations) ;
- Un réseau de partage entre institutions flamandes, francophones et germanophones. Par exemple, Vi.Be (Flandre) et le Conseil de la Musique (Wallonie/Bruxelles) ont organisé des showcases d’artistes des trois communautés qui ont été diffusés sur RTBF et VRT pour offrir une visibilité nationale.
4.2. La diversité comme outil de mobilisation collective
En communiquant autour de cette diversité, la SMB mobilise un sentiment commun, celui de l’identité belge musicale partagée. Cette démarche permet différentes choses comme :
- Renforcer la fierté collective autour d’un patrimoine musical qui est souvent peu mis en avant.
- Créer un lien émotionnel avec le public, qui se reconnaît dans les genres représentés.
- Donner plus de légitimité au secteur musical belge, au-delà des différences de régions ou de styles.
Conclusion
La Semaine de la Musique Belge 2025 est un bon exemple de communication collaborative, mêlant visuels forts, participation en ligne et mise en valeur de la culture. En utilisant des éléments marquants comme le hashtag, le logo, les couleurs ou les formats adaptés au numérique et en impliquant à la fois le public et les artistes, l’événement ne se contente pas de faire de la promotion, il crée un récit collectif. Grâce à l’analyse sémiotique, on comprend que la communication ne sert pas seulement à diffuser des infos, mais aussi à créer du sens, du lien et un sentiment d’appartenance partagé.
Et vous, avez-vous participé à la Semaine de la Musique Belge 2025 ? Partagez vos découvertes, vos artistes coups de cœur ou vos créations avec le hashtag #SEMAINEDELAMUSIQUEBELGE !
Pour vous plonger pleinement dans l’univers de la Semaine de la Musique Belge 2025 et découvrir l’ensemble des contenus, rendez-vous sur le site officiel de l’événement en cliquant sur le lien suivant : https://www.weekvandebelgischemuziek.be/fr
Pour en savoir plus sur les concerts candelight, n’hésitez pas à aller voir « https://decodagecom.be/comment-lambiance-des-concerts-candlelight-est-elle-communiquee-par-le-biais-des-reseaux-sociaux-numeriques/«
Références
- Alloing, C., & Pierre, J. (2017). La communication numérique. Paris : Armand Colin.
- Barthes, R. (1964). Rhétorique de l’image. Communications, 4(1), 40-51.
- Bouquillion, P., & Matthews, J. T. (2010). Le Web collaboratif. Mutations des industries de la culture et de la communication. Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble.
- Eco, U. (1988). Le signe. Bruxelles : Éditions Labor.
- Kaplan, A. M., & Haenlein, M. (2010). Users of the world, unite! The challenges and opportunities of Social Media. Business Horizons, 53(1), 59-68.
0 commentaires