Aujourd’hui, nous avons 1 chance sur 2 de tomber sur une publicité cachées pour un quelconque produit, dès qu’on ouvre une story de notre influenceur préféré. Vous ne me croyez pas… pas vrai ? Mais si, vous voyez toutes ces stories Instagram « test de produits », ces « hair/skin care & autres routines ». Par contre, saviez-vous que dans la majorité des cas, les influenceurs sont rémunérés par les marques ? Ou encore que légalement, ils sont obligés de vous informer de ces divers partenariats ? Nous allons alors essayer de débusquer ses publicités cachées, ses partenariats, sur Instagram.
Brève « story » du partenariat
L’histoire du partenariat est fortement liée à celle du marketing d’influence et à l’explosion des réseaux sociaux. Cet outil marketing a commencé à se faire connaitre sur YouTube. Et il a pris de l’importance avec l’avènement des influenceurs, notamment sur Instagram.
1ère époque: YouTube
Les 1er cas de partenariat, ou plutôt de placement de produit, sur YouTube ont été répertoriés vers les années 2010. Cependant, au début, les vieweurs ne voyaient pas d’un bon oeil ces pratiques . De plus, ils critiquaient fortement, voir incendiaient, les youtubeurs qui le faisaient. La pratique a commencé à se démocratiser vers 2013. D’ailleurs, des chaines YouTube entièrement financées par des placements de produits, tel que « Cyprien Gaming », ont commencé à voir le jour. Ou encore des marques finançant des séries de vidéos, comme « Crunch sort Norman de sa chambre ». En plus de ça, des chaines de médias traditionnels, sentant le bon plan, se sont également mises à investir de l’argent dans des collectifs de vidéastes, comme Canal + finançant le Studio Bagel.
L’augmentation de l’acceptation des fans vis-à-vis de cette pratique à évoluée en parallèle de la professionnalisation du métier de youtubeur. Le problème avec les placements de produit était que peu de vidéastes les mentionnaient les placements de produit. On voyait souvent cela sur les chaines gaming. Des éditeurs de jeux vidéos payaient les youtubeurs pour tester leurs jeux. De plus, peu de vidéastes y faisaient attention et personne ne pensait à le faire. Alors en 2016, YouTube décida de modifier son algorithme afin d’être plus vigilant sur ces placements de produits non signalés. Donc, pour aider les youtubeurs à répondre à ces exigences, la plateforme a décidé d’ajouter une fonction d’ajout pour mentionner quand il y a un partenariat dans une vidéo. C’est la très célèbre « Inclus communication commerciale ».
2nd époque: Instagram
En parallèle de YouTube, Instagram gagne également en popularité auprès des influenceurs et des marques. D’ailleurs, l’acceptation des partenariats auprès des utilisateurs suit la même tendance que les placements de produits sur YouTube. En 2013, le réseau social a connu une de ses premières polémiques à propos d’un partenariat. L’influenceuse Hello It’s Valentine, publie une photo d’un de ses sacs avec un tube de dentifrice Oral-B. Lorsque ses fans lui font remarquer qu’elle est en train de faire un placement de produit d’une manière très peu subtile, elle commence par le nier. Suite à sa réaction, ses fans et d’autres utilisateurs la critiquent fortement. Alors, pour apaiser les tensions, l’influenceuse avoue finalement son contrat avec la marque. Celle-ci lui a d’ailleurs offert une robe Carven.
Aujourd’hui, ce genre de partenariat est habituel pour les utilisateurs d’Instagram et de plus en plus accepté par ces derniers. Même si tous les partenariats ne sont pas toujours mentionnés clairement. Dès lors, en 2017, Instagram décide d’ajouter une fonction (comme sur Youtube) leur permettant d’en faire la mention plus clairement et facilement.
Malgré tout cela, selon une enquête du CMA (Competition Market Authority) au Royaume-Uni, encore très peu d’influenceurs l’utilisent et signalent cette pratique. (Alors) la plateforme va donc prendre de nouvelles mesures pour mieux cadrer le marketing d’influence, et ce dès Juin 2021. Comme mesure, Instagram va mettre en place un algorithme capable de repérer les publications sponsorisées même si elles ne sont pas signalées comme telles. Les influenceurs se faisant attraper par l’algorithme seront alors sanctionnés par la plateforme. Pour éviter cela, Instagram invite alors les influenceurs à signaler d’office quand ils font un partenariat.
Les bonnes et les mauvaises pratiques pour des partenariats
Une bonne pratique est de signaler à leurs followers quand une publication ou une story est réalisée en partenariat avec une marque. Cette pratique est même une obligation légale. Alors, pour aider les influenceurs à respecter cette directive, l’ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité) a publié, en 2017, des recommandations dans un article et fait une vidéo pour les expliquer. Ces recommandations se basent sur le principes de Transparence dans la façon dont ces derniers communiquent sur leurs partenariats.
Être explicite
La première recommandation de l’ARPP est d’être le plus explicite possible sur ses partenariats. Les influenceurs doivent le signaler de façon claire et accessible pour tous les utilisateurs. (Alors) certaines formulations et hashtags dérivés de l’anglais, comme #ad ou #sponso, ne sont pas compréhensibles par tout le monde. D’ailleurs, certains influenceurs jouent beaucoup avec ces formulation assez floues, comme « grâce à » ou « avec ». Comme par exemple la youtubeuse Natoo qui proposa un concours « grâce à » Zalando.
Être directement identifiable
La deuxième recommandation est que la mention doit être directement identifiable comme un partenariat, sans que l’utilisateur ne doive faire aucune manipulation (pas de scroll ou de cliquer sur le « voir plus »). La meilleure chose à faire est de marquer au-dessus de la photo, avec la mention « Publication sponsorisée » ou « Partenariat ».
Les mauvaises pratiques pour des partenariats
Certains influenceurs jouent, alors, avec l’algorithme Instagram. Ils signalent le partenariat avec le #partenariat mis à la toute fin de la légende et donc n’est pas visible par la majorité des utilisateurs. Ou encore, pour les stories sponsorisées, le hashtag est mis soit en tout petit, ou encore en ton sur ton (le #ad écrit en rouge sur un fond rouge).
D’autres vont aussi attendre 24h ou 48h avant de mentionner le partenariat, puisque selon eux l’algorithme met moins en avant les publications sponsorisées. Alors, ils attendent quelques temps avant de le signaler pour pouvoir amasser le plus de visibilité possible, et donc de revenus, sur ce laps de temps. Quand d’autres oublient carrément de le mentionner. Comme par exemple, McFly et Carlito qui ne l’ont pas mentionné lors de stories sponsorisées pour promouvoir une série audio de Spotify. La plateforme d’écoute s’est retournée sur ces deux youtubeurs français. Mais était-ce un simple oubli de ces deux créateurs de contenus ou un acte de mauvaise foi ?
À qui la responsabilité ?
C’est une question qu’on est en droit de se poser. Qui est responsable de ces publicités cachées ? Est-ce la faute des influenceurs, eux-mêmes, qui ne respectent pas les clauses des contrats passés avec les marques ? Ou est-ce les marques qui essaye de contourner la loi en passant par les influenceurs ? Ou est-ce les deux parties qui en jouent ?
La faute aux influenceurs ?
Les influenceurs ont, en effet, une certaine part de responsabilité dans ce phénomène. Mais pourquoi jouent-ils comme ça avec la légalité ?
Dans certains cas, ils ne connaissent pas toujours la loi et les pratiques légales à propos de la publicité sur les réseaux sociaux. En effet, certains influenceurs sont assez jeunes et n’y connaissent rien. Ils font alors confiance soit aux marques, soit à la personne qui gère les partenariats pour eux. Ces personnes doivent alors leur rappeler de les signaler. Mais quand ce sont les parents des influenceurs adolescents qui gèrent cet aspect de la carrière de leurs enfants, il est plus difficile de faire respecter ces directives car ces derniers ne sont pas non plus au courant de ces règles.
Dans d’autres cas, les influenceurs ne veulent pas être perçus comme Homme/ Femme-sandwich digital au service des marques. D’une part, parce que si c’est l’image qu’ils renvoient, ils peuvent perdre la confiance de leur communauté et donc leur soutien. Et si ils perdent leur soutien, ils vont perdre des abonnés et donc de la visibilité. Au final, s’ils perdent trop d’abonnés et de visibilité sur Instagram, ils vont également voir leur revenu diminué.
Un dernier cas est celui des agents d’influenceur qui ne font pas (ou mal) leur boulot. Certains « oublient » de donner la totalité des infos pour les partenariats à leur client ou encore de vérifier leurs publications. Ces « oublis » peuvent se comprendre de cette manière. Les agents sont payés à la commission et cette commission peut être évaluée selon ce que rapporte la publication à leur client et à la marque. Il oublie alors de leur rappeler de signaler le partenariat, ou d’attendre quelques jours avant de le faire, pour gagner en visibilité.
Les catégories d’influenceurs
Selon certains agents d’influenceurs, il existerait deux catégories d’influenceurs :
- Il y a ceux qui vont totalement respecter les directives. Ce sont souvent les influenceurs vulgarisateurs (historique, scientifique, etc.) qui ont un fort sens éthique qui auront plus tendance à les respecter
- Il y a ceux qui n’en n’ont rien à faire. Cette catégorie d’influenceurs se sentent totalement intouchables.
Et les marques ?
Quelques marques ne sont pas en reste et jouent également avec les limites de la légalité.
Ces marques « oublient » de rappeler aux influenceurs qu’ils contactent l’obligation de signaler le partenariat, ils ne le mettent pas dans les clauses du contrat qu’elles passent avec ces derniers. Elles les incitent même à ne pas le faire. Mais cette pratique est compréhensible. En effet, le but du partenariat pour les marques est de gagner en visibilité. Et si l’algorithme Instagram sanctionne d’une certaine façon les publications sponsorisées, cela est un peu contre-productif.
D’autres marques, elles, manipulent les influenceurs qu’ils contactent. Elles ne vont pas donner toutes les infos concernant le produit qu’ils doivent promouvoir. Cela est arrivé récemment à Johan Papz qui a fait la promotion d’un herbicide presque interdit en Europe, le Bonalan, sous la forme d’un reportage. Ce dernier n’était pas au courant. En effet, l’agence qui l’avait contacté, a omis certains détails sur le produit, notamment celui de la dangerosité de ce dernier. C’est Hugo Clément, un journaliste, qui a fait la lumière sur ce cas.
Une mauvaise foi des 2 côtés
Avec tous les éléments qu’on vient de voir, on peut en déduire qu’il existe une certaine mauvaise foi à propos des partenariats, à la fois du côté des influenceurs et des marques.
En effet, le but des influenceurs est de gagner leur vie. Et pour cela, ils ont besoin de faire des partenariats qui est leur principale source de revenus. Seulement, pour être contacté par des marques, ils faut déjà avoir un minimum de visibilité sur les réseaux sociaux. Alors, si l’algorithme les pénalise d’une certaine manière, ils n’ont pas vraiment le choix que de contourner la loi (surtout pour les plus petits influenceurs).
Alors que le but des marques est de gagner en visibilité en allant toucher les communautés des influenceurs. Mais également de faire la promotion de leurs produits sans que ce ne soit trop évident pour les utilisateurs. Et pour cela, ils vont utiliser le lien de proximité et de confiance qu’a réussi à construire ces derniers avec leur communauté.
Les deux jouent alors avec la légalité et en utilisant les mêmes procédés dans, plus ou moins, le même but : Gagner en visibilité pour empocher plus de revenus.
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