Les médias libres en Hongrie : les derniers résistants sont menacés

par | Avr 22, 2022

Les médias libres sont totalmente menacées en Hongrie. Fin juillet 2020, Szabolcs Dull, le rédacteur en chef du journal indépendant Index.hu a été licencié de son poste. Index était le dernier grand portail indépendant de Hongrie et ce licenciement a marqué la reprise de manifestations contre le gouvernement de Viktor Orbán et les mesures anti-démocratiques de contrôle du pays.

Deux jours après, le 24 juillet 2020, environ 70 journalistes du journal (deux tiers des employés) ont annoncé leur démission dans une lettre ouverte

Aujourd’hui, presque 2 ans après, Viktor Orban a été réélu premier ministre hongrois de nouveau… Quelles techniques de communication ont été utilisées par ce gouvernement pour se maintenir au pouvoir depuis 2010 dans ce pays membre de l’Union Européenne ?

Le système de fondations

Ce système peut être le principal motif des dénonces de l’opposition du contrôle de tous les secteurs par le premier ministre. Récemment aussi, des grandes manifestations d’étudiants ont eu place dans les plus grandes universités, aussi touchées par ce système. Mais à quoi consiste-il ? C’est assez simple : le gouvernement passe à créer une fondation pour être en contrôle d’une institution, ou d’une organisation.

Ces fondations gagnent alors un grand contrôle sur les organisations car elles détiennent le contrôle des profits de l’institution. Elles vont déterminer, avec le gouvernement, qui va ou ne va pas gagner plus d’assistance du gouvernement. Pour avoir une idée de comment ce système marche, en 2015, 31 agences de presse ou journaux étaient liés au gouvernement. En 2018, ce nombre dépasse les 500.

Ce système permet au gouvernement de transmettre son message (souvent mélangé à de la propagande politique) sans aucune barrière à toutes les villes du territoire en utilisant les principales chaînes de télévision, les radios et la presse.

Index : le dernier bastion de la démocratie ?

Pour contextualiser, en 2014 la fondation KESMA (contrôle par le gouvernement) a pris le contrôle du portail en ligne Origo, le plus populaire du pays à l’époque. Les nouveaux patrons ont viré le rédacteur-en-chef d’Origo, Gergő Sáling, et des dizaines de journalistes ont démissionné en protestation. Szabolcs Dull (du portail Index) était l’un de ces journalistes. Depuis cette prise de contrôle, Origo est devenu un site de propagande du parti politique Fidesz.

En 2017, le « conseil des médias » établi par le gouvernement pour contrôler tous les médias du pays, est composé de cinq membres : tous nommés par le parti du premier ministre. Ce conseil a été responsable de la vente des nombreux quotidiens régionaux qui ont été rachetés par les fondations proches d’Orbán, créant ainsi un effet de monopole de la presse du territoire.

En 2020 Index.hu avait environ un million de vues par jour – dans un pays avec moins de dix millions d’habitants. C’est un chiffre énorme qui a beaucoup inquiété le premier ministre et les membres de son parti Fidesz. Le gouvernement a enchainé alors des stratégies de communication pour mettre en cause la rentabilité du journal périodique, en disant qu’un changement de l’administration était fondamental pour donner plus de rentabilité à Index.

Média menacée : les journalists du portail annoncent leur démission
Les journalistes du portail Index annoncent leur démission

Index x Orbán : une bataille de communication pas très égale  

Pour répondre aux interventions du gouvernements dans la rédaction du périodique, Index crée alors un baromètre de la liberté de presse du journal. L’existence de ce dispositif inquiète déjà les membres et alliés du gouvernement, qui utilisent d’autres médias pour dire que le pays a une énorme liberté de presse, comme tous ses voisins européens.

Baromètre de la liberté de presse d'Index
Baromètre de la liberté de presse

En mai 2020, après nouvelles interventions du gouvernement, le portail Index décide de changer ce baromètre du statut « indépendant » pour « en danger ». Cette action a enchaîné des changements des directeurs de la fondation qui contrôle Index, au moins trois directeurs ont été embauchés et virés ou ont démissionné de la fondation pendant un court période de quelques semaines.

Les répercussions de ces actions ont touché même la commissaire européenne Věra Jourová, qui publie un article en solidarité aux journalistes d’Index. De l’autre côté, le ministre des Affaires étrangères Péter Szijjártó dit en entretien que « c’est un fake news, les médias sont libres en Hongrie. Il est impossible de citer un secteur des médias – radio, internet, TV – dont le leader serait pro-gouvernement ».  

En juillet 2020 la fondation qui contrôle Index annonce la démission de Szabolcs Dull, le rédacteur en chef du journal, à partir d’une lettre qui explique qu’il n’est pas capable d’arrêter les controverses internes qui affectent la situation financière du journal. Le vendredi 24 juillet 2020, plus de 80 journalistes, dont plusieurs éditeurs-en-chefs, décident de quitter Index, ils représentent plus des deux-tiers des employés du journal. Cela a créé un grand bruit par tous les médias européens à l’époque.

Même si en Europe les gens étaient choqués par ces actions contre le média libre en Hongrie, dans le pays victime de cette action, beaucoup de monde n’a même pas reçu l’information de ce que c’est passé. Le gouvernement contrôle la plupart des médias traditionnels, presse-papier, radio et télé, faisant alors le marketing personnel du premier ministre et de son parti. Alors, pour tous les hongrois qui ne reçoivent pas d’information en ligne, cette information n’a pas existé. Cela est un reflet du contrôle sur les informations que le peuple voit ou ne voit pas en Hongrie, fortement employée par le parti du gouvernement depuis 2010.

Des spécialistes affirment que la seule chose démocratique que reste en Hongrie est leur appartenance à l’Union Européenne, parce que le reste est déjà contrôlé par le premier ministre et son parti.

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