Gouvernance partagée et communication : un duo gagnant ?

par | Mar 21, 2025

Dans un monde professionnel dominé par des modèles hiérarchiques, la gouvernance partagée émerge comme une alternative basée sur la confiance, l’autonomie et la prise de décision collective. Mais comment assurer son bon fonctionnement ? La communication interne joue un rôle clé en facilitant la coordination, la transparence et l’implication des collaborateurs. A travers une analyse théorique et une étude de cas, découvrez comment ces deux dynamiques s’entremêlent. 

La gouvernance partagée, c’est quoi ? 

Dans la grande majorité des entreprises, on retrouve une gouvernance patriarcale, de contrôle et hiérarchique. En opposition à cela, la gouvernance partagée propose une nouvelle façon de « faire ensemble » et constitue un changement de paradigme puissant. Voici ses principales caractéristiques (Van Ditzhuyzen, 2019) : 

  • Elle est basée sur la confiance et la responsabilité de chacun.
  • Elle construit un rapport d’équivalence au pouvoir entre les individus d’un même organe de l’entreprise, où chacun est autonome et souverain pour agir. 
  • Une dimension verticale persiste, en passant du contrôle a priori au contrôle a posteriori
  • Elle nécessite des processus collectifs et règles de fonctionnement précises : priorisation des actions, définition des rôles, des cercles et de leurs périmètres, etc. 
  • Elle valorise une culture de bienveillance et d’authenticité.

La gouvernance partagée vise donc à encourager la prise de décision collective et à organiser le dialogue afin de coconstruire les décisions (Bélorgey et Van Laethem, 2023). Pour cela, chaque collaborateur doit faire preuve de transparence afin de parvenir à une synergie (Jacob et Poitras, 2015).

Et la communication interne… Quelle est sa place dans les entreprises ?

Qu’en est-il de la communication interne ? Cette dernière se définit tout d’abord comme l’ensemble des actions de communication adressées aux membres d’une organisation. En second lieu, elle représente un instrument d’adhésion interne aux valeurs de l’entreprise, de construction de solidarité et d’implication des employés (Décaudin et Igalens, 2017). 

Plus spécifiquement, la communication organisationnelle se compose de six dynamiques (Robert-Tanguy, 2024) : 

Dynamique relationnelle : elle englobe les échanges conviviaux et les échanges professionnels de proximité comme l’entraide. Tous deux renforcent les liens interpersonnels.

Dynamique identitaire : la communication véhicule l’identité de l’entreprise et construit un esprit collectif, des valeurs et des objectifs communs. 

Dynamique de coordination : la communication synchronise les membres de l’organisation pour mener un projet commun. 

Dynamique de transmission : elle favorise les apprentissages individuels et collectifs grâce à la diffusion d’informations, le mimétisme et l’expérience répétée. 

Dynamique de structuration : cela concerne les échanges sur les problèmes organisationnels, permettant ensuite de développer et d’améliorer la structure et les dispositifs de gestion. 

Dynamique projective : la communication façonne les croyances sur l’avenir. Elle permet ainsi aux membres de se projeter et d’adhérer ou non aux projets de l’organisation. 

Selon la taille et le type d’organisation, la communication interne intégrera ces dynamiques à des degrés variables.  

Concernant sa raison d’être, Cobut (2015) évoque cinq objectifs principaux : la compréhension des enjeux, la circulation de l’information, l’intermédiation sociale, la cohésion et la production de sens. 

La communication, un levier essentiel de la gouvernance participative

Sur base des indications précédentes, la communication interne semble avoir une place cruciale dans les entreprises qui partagent la gouvernance et le pouvoir. En effet, nombreux sont les liens que nous pouvons faire entre ces deux pratiques ! Ci-dessous, vous retrouverez quelques informations complémentaires sur la communication en entreprise exposées par Cobut (2015), ainsi que leur relation évidente avec la gouvernance partagée.  

  • La gouvernance participative prônant le travail collectif, la communication permet de faciliter la circulation de l’information et d’assurer une coordination entre les employés. Cela les rend ensuite plus efficaces dans l’accomplissement de leurs tâches.  
  • La communication organisationnelle est connue pour promouvoir le dialogue et la transparence, c’est-à-dire deux éléments indispensables dans la gouvernance partagée.
  • Elle favorise le partage d’informations entre collègues, ce qui participe au développement de l’intelligence collective. Il s’agit une nouvelle fois d’une base de la structure collaborative. 
  • Étant un vecteur de sens et de valeurs, la communication interne est efficace pour transmettre la culture d’entreprise. Lorsque cette dernière repose sur le partage de la gouvernance, la communication représente un pilier pour aider les employés à mieux intégrer ce mode de fonctionnement. 
  • Nous savons que la communication interne favorise l’implication des employés, de par sa définition, mais comment s’y prend-elle ? Tout simplement en créant un climat de confiance et de collaboration franche, renforçant la motivation des travailleurs. Cette implication rend ensuite les employés plus enclins à prendre des initiatives.  Ces divers éléments constituent, eux aussi, des ingrédients essentiels pour un partage efficace de la gouvernance ! 
  • La communication dans les organisations s’inscrit également dans une démarche de formation. En effet, en informant, expliquant et garantissant la compréhension des informations auprès des acteurs internes, elle vise à améliorer leurs compétences. En conséquence, un personnel qualifié et compétent peut davantage participer au processus de décision (Cobut, 2015). 

Cas spécifique d’une ASBL : la communication non violente

Parmi les organisations innovantes qui ont osé adopter la gouvernance partagée, certaines vont encore plus loin en intégrant des pratiques spécifiques pour renforcer la communication interne. C’est le cas d’une ASBL en Wallonie, qui a opté pour une approche singulière : la communication non violente. En effet, dans un contexte où l’autonomie et la collaboration sont primordiales, il devient crucial de trouver des méthodes de communication qui favorisent l’empathie et le respect mutuel. Mais en quoi consiste la communication non violente et comment s’intègre-t-elle dans leur mode de gestion collective ?

Cette ASBL propose des formations et des activités autour du maraichage, de l’agroécologie et de la permaculture. Ainsi, elle prône des pratiques respectueuses de l’environnement et des relations humaines. Nicolas et Sarah [pseudonymes], deux membres de l’association, nous partagent leur expérience. 

Tout d’abord, tous deux confirment la nécessité absolue d’une communication efficiente au sein de l’organisation en cas de partage de la gouvernance. Ils expriment que le plus important est de définir clairement les responsabilités et rôles de chaque membre. Il est crucial que chacun connaisse son périmètre d’action pour savoir jusqu’où il est possible de prendre des décisions en toute autonomie. Comment procèdent-ils ? 

Nicolas, coprésident de l’ASBL, nous confie : « Alors en fait, on se répartit les projets par groupes de travail temporaires, composés d’environ 4-5 membres. Donc les membres changent à chaque fois en fonction des projets. Pour que ça fonctionne, on définit tous ensemble les objectifs et responsabilités de chaque groupe. Puis, chaque personne est libre de prendre des décisions dans le cadre de son projet. »

Mais concrètement, comment se déroule la communication dans un tel fonctionnement ? 

Selon Nicolas : « Au sein d’un groupe de travail, on communique beaucoup entre nous pour se coordonner et se répartir les tâches. Mais avec l’ASBL, ce qu’on fait, c’est qu’on se réunit une fois par mois tous ensemble pour communiquer les informations importantes. Ca permet de se tenir au courant de l’avancement des projets respectifs en toute transparence comme ça tout le monde a une vision globale de l’ASBL. Mais ce sont des réunions purement informatives, et non décisionnelles. » 

Sarah, responsable communication, ajoute : « La particularité chez nous, c’est qu’on a mis en place ce qu’on appelle la communication non violente. On est formé à s’exprimer en toute bienveillance et empathie, et en évitant l’agressivité à tout prix ! […] Concrètement, il faut suivre quatre étapes lorsqu’on doit communiquer quelque chose d’important à un collègue : exprimer ce qu’on a observé, puis ce qu’on a ressenti, notre besoin qui en découle et enfin formuler une demande claire. » 

Source : Du bonheur en barres

Les deux membres nous ont ainsi exprimé que cette communication non violente permet de garantir des interactions fluides et respectueuses. Selon eux, cela est primordial pour assurer le bon fonctionnement de leur structure participative. Depuis qu’ils l’ont instaurée, leur climat de travail s’est nettement amélioré et la cohésion de groupe s’est renforcée.

En effet, Nicolas témoigne : « Avec la communication non violente, on sort du schéma où une personne impose son point de vue. Ici, on apprend à écouter et à trouver des solutions qui respectent les besoins et avis de tous. »

Ainsi, ce type de communication organisationnelle apparaît comme un outil précieux pour accompagner la mise en place d’une gouvernance partagée

Quelle conclusion tirer ?

La gouvernance partagée repose sur une communication fluide et transparente. Comme nous l’avons vu, la communication interne joue un rôle clé en facilitant la coordination, la cohésion et l’implication des membres. L’exemple de l’ASBL illustre comment le cas spécifique de la communication non violente permet de renforcer la dynamique collective et d’assurer un fonctionnement harmonieux. 

Toutefois, le partage du pouvoir peut aussi être source de tensions organisationnelles. Alors, comment prévenir ces conflits et maintenir un climat de travail serein ? Découvrez nos astuces pratiques dans notre article précédent et adoptez des solutions concrètes pour améliorer l’harmonie au sein de vos équipes ! http://decodagecom.be/quelques-tips-pour-resoudre-les-tensions-entre-les-departements-dune-organisation/ 

Bibliographie

Bélorgey, P.  et Van Laethem, N.  (2023) . Outil 40. La gouvernance partagée. La MEGA boîte à outils du manager leader – 2e éd. 100 outils. ( p. 226 -232 ). Dunod. https://shs.cairn.info/la-mega-boite-a-outils-du-manager-leader–9782100852109-page-226?lang=fr.

Cobut, E. (2015). La Communication interne: 2eme édition. Edipro.

Décaudin, J.  et Igalens, J.  (2017) . Introduction. La communication interne – 4e éd. Stratégies et techniques. ( p. 1 -3 ). Dunod. https://shs.cairn.info/la-communication-interne–9782100761944-page-1?lang=fr.

Jacob, R.  et Poitras, J.  (2015) . Travailler en mode collaboratif : pour aller plus loin. Gestion, Vol. 40(3), 52-59. https://doi.org/10.3917/riges.403.0052.

Robert-Tanguy, P.  (2024) . Une modélisation de la communication interne dans les petites et moyennes entreprises. Communication & Organisation, (2), 99-114. https://doi.org/10.4000/138s9.

Van Ditzhuyzen, L.  (2019) . La gouvernance partagée, une autre aventure. Alternatives Non-Violentes, N° 191(2), 2-6. https://doi.org/10.3917/anv.191.0002

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